jeudi 13 janvier 2011

"J'aimais l'école"

"J'aimais l'école. Le maître parlait aux enfants. Je venais de mon réduit où personne ne me parlait, et là il y avait quelqu'un à écouter. J'apprenais tout ce qu'il disait. C'était si beau de voir un homme expliquer aux enfants les nombres, les années de l'histoire, les lieux de la géographie. Grâce à une carte en couleurs du monde, sans jamais avoir quitté la ville, on pouvait connaître l'Afrique qui était verte, le pôle Sud blanc, l'Australie jaune et les mers bleues. Les continents et les îles étaient du genre féminin, les océans et les montagnes étaient masculins.

A l'école, il y avait les pauvres et les autres. (...)

On écrivait avec une plume et de l'encre versée dans un trou de notre pupitre. Ecrire était une peinture. (...) . Nous de la pauvreté, nous séchions notre feuille à la chaleur de notre respiration. Sous notre souffle, le bleu de l'encre tremblait en changeant de couleur. Les autres l'essuyaient avec un buvard. Le vent que nous faisions sur la feuille à plat était plus beau. Les autres écrasaient les mots sous leur petit carton blanc. " Erri De Luca - Le jour avant le bonheur - Roman . Gallimard

mercredi 12 janvier 2011

Convoquer "les savoirs domestiques", est-ce enseigner ?

Par "savoirs domestiques", formulation un rien alambiquée j'en conviens, désignons ici plus simplement "les connaissances acquises à la maison".
Sans esprit provocateur, mais honnêtement, combien de fois le maître, notamment en début de séance, en particulier lorsqu'il enseigne dans les domaines de la découverte du Monde, des sciences ou de la géographie, sollicite-t-il les élèves sur des connaissances acquises en dehors de la classe ?
Il en va souvent de même lorsqu'il s'agit d'expliquer du vocabulaire.
Où l'on voit bien quels milieux sociaux peuvent se trouver alors mis en avant...

Plus perfide serait la question de mesurer si la séance d'enseignement apportera alors d'autres connaissances que celles déjà acquises par certains élèves en dehors de la classe...


L'école par nature, sollicitera moins les élèves sur d'autres types de savoirs...dits moins scolaires... notamment des "savoirs faire" qui concerneraient l'activité manuelle, sportive, artistique...

Dans le même temps, soucieux que la transmission ne passe pas de façon univoque par son canal, on peut comprendre que le maître fasse appel aux connaissances acquises en dehors de l'école... Le livret personnel de compétences, envisage explicitement la validation possible à l'école de connaissances construites en dehors...

Il serait d'ailleurs un peu stupide que le seul canal officiel et autorisé de la transmission des connaissances soit celui de l'école.
L'école a également pour mission d'organiser les connaissances... et d'appeler plus loin à en vérifier la validité...

L'élève qui explique son savoir à ses camarades peut apprendre ainsi à traduire ce qu'il sait auprès de ses pairs... mais ses pairs s'approprieront-ils les dites connaissances et ne seront-ils pas renvoyés à l'amer constat qu'il y a "ceux qui savent" et "ceux qui ne savent pas" ?
D'un besoin de prudence vis à vis de ces habitudes, on reprendra l'idée du "bombardement culturel" (Chauveau ou la pédagogie de maîtrise à effet vicariant ont dû employer la formule)... avec l'idée de faire de la classe le lieu de rencontre, de diffusion et de partage d'une culture humaniste, scientifique et artistique largement partagée...
Faut-il revenir aux petits musées du temps de Jules Ferry ?
Très tôt en tout cas, la curiosité du Monde, des arts et des sciences, devrait prendre sa place à l'école... mais on devrait également bien penser aux différentes formes d'intelligence... acculturation, enrichissement, droit à la ressemblance, capacité de l'école à dépasser les déterminismes sociaux... L'enjeu n'est pas mince et suppose aussi des maîtres curieux, lecteurs, cultivés et créatifs...

lundi 10 janvier 2011

defensive teaching

Simplifier le contenu et réduire les exigences comme les demandes faites aux élèves, favoriser une présentation attrayante des apprentissages et éviter les conflits... ce serait ce que plusieurs études auraient repéré aux Etats Unis... avec d'une part la croyance qu'il faut simplifier à tout prix notamment face à des publics difficiles et d'autre part éviter les conflits dans des contextes de judiciarisation.

J'avoue qu'en étant tombé parfois sur quelques séries américaines et juste avant de m'y endormir, je m'interrogeais sur l'image qu'on y donne de l'école où les élèves convoqués de temps en temps pour des exposés et la vie sociale (élire des délégués) me semblaient bien passifs... et peu préoccupés d'apprentissage - à part quelques mémorisations - mais plus sérieusement, en lisant ces divers articles je m'interrogeais de savoir si parfois en France comme ailleurs :
- la confrontation en particulier à un public faible ou en difficulté ne poussait pas à proposer des contenus faciles où sous prétexte de ne pas élever trop haut la marche on renonce à l'exigence...
- la notion de compétence présente notamment dans les livrets personnels de compétences ne risquait pas d'être lue a minima dans certains contextes.
On peut se le demander notamment en éducation prioritaire où parfois, pour toute une série de bonnes raisons qu'ils se donnent, les maîtres diffèrent l'entrée dans certains apprentissages réputés "complexes", sous prétexte que les "bases" n'y seraient pas...
On néglige souvent que ces "bases" comme l'enrichissement du lexique par exemple, sont nourries entre autres des différentes disciplines. De même c'est aussi dans ces disciplines que l'élève va trouver du sens à nombre d'apprentissages. Je pense tout particulièrement aux sciences qui loin d'un bricolage amusant doivent permettre d'aider tous les élèves à construire une pensée rationnelle, à dire, écrire, lire, organiser la pensée...
à suivre